Diagnostic
Dans le cadre de l’élaboration de la Charte Forestière de Territoire, un diagnostic précis de la filière hêtre a été réalisé en 2013 et 2014.
Les forêts du Pays d’Épinal couvrent une surface d’un peu plus de 101 000 hectares, 50% de la surface boisée appartient aux Communes ou à d’autres collectivités, 22% à l’Etat (Forêt Domaniale) et 28% aux propriétaires privés. C’est donc une très grande proportion, avec 72% de la surface forestière, qui est soumis au régime forestier et donc sous gestion de l’Office National des Forêts (ONF) pour 71 600 ha.
La forêt privée est majoritairement constituée de feuillus (taillis, futaie et taillis sous futaie) pour 55%. Le Hêtre est l’essence majeure en forêt privée sur le territoire. Il est associé au Pin sylvestre et au Sapin dans les futaies mixtes[1], tout en restant majoritaire.
La répartition des peuplements et des essences en forêt publique est similaire à ce qui est observé en forêt privée à quelques nuances prés. En effet, la proportion de peuplement dont les essences feuillues sont majoritaires approche les 70% contre 24% pour les peuplements à base de résineux. Concernant les essences, c’est également le Hêtre qui est majoritaire avec 25% des peuplements dans lesquels il dépasse les 65% en couverture suivi par le Chêne (sessile et pédonculé) avec 23%.
[1] Mélange d’essences feuillues et résineuses dont aucune ne dépasse, à elle seul, 75% du couvert (IFN)
Sur l’ensemble de la surface forestière, à partir des données CRPF, F&BE et ONF, nous avons évalué à 18 000 ha les peuplements dans lesquels le Hêtre représente plus de 65% du couvert. Pour les forêts dont il représente un couvert compris entre 35 et 65%, la surface est évaluée à 11 000 ha. Enfin, nous comptabilisons 10 500 ha au sein desquels le Hêtre est présent mais minoritaire (< 35%). Au total, cette essence est présente sur environs 40 000 ha de forêt en proportion ayant un impact sur la sylviculture.
Analyse des flux de matière - Hêtre
Depuis la forêt
La base de données de la commercialisation des bois de Hêtre en forêt publique a servi de base pour essayer d’analyser, selon les clients des lots, la destination des grumes de Hêtre.
Figure 1 : Destination géographiques des grumes de Hêtre vers la 1ère transformation depuis la forêt publique (évaluée sur la base des volumes vendus les 4 dernières années).
L’évaluation est assez simple pour les bois façonnés, le client étant très souvent le transformateur direct. En particulier lors des ventes par contrat, l’ONF s’astreint à approvisionner les scieurs locaux. On constate donc qu’une part conséquente du bois d’œuvre vendu façonné est transformée sur le territoire du Pays.
Pour les bois vendus sur pied, l’évaluation est beaucoup plus aléatoire, car elle se base sur le déclaratif d’un échantillonnage des clients. Une forte proportion est dans ce cas vendu aux exploitants forestiers qui trient et orientent les bois vers le client mieux-disant. L’orientation de la destination des bois échappe alors tout à fait au producteur ou à son gestionnaire. Le principal critère orientant le flux devient donc le prix, ce qui explique l’augmentation visible des volumes de bois exportés, en particulier vers la Chine, ces dernières années. En effet, des offres d’achat ont été faites aux exploitants et coopératives permettant de mieux rémunérer que le marché local, malgré les frais de manutention et de traitement des bois induits, et ce pour des exigences de qualité moindre. L’écart de prix s’est réduit à l’automne 2012 mais ce marché reste intéressant pour un certain nombre de basses qualités.
Bois façonnés
Pays d'Epinal CDV
Lorraine
Régions voisines
Export lointain
Bois sur pied
Pays d'Epinal CDV
Lorraine
Régions voisines
Export lointain
Figure 1 : Destination géographiques des grumes de Hêtre vers la 1ère transformation depuis la forêt publique (évaluée sur la base des volumes vendus les 4 dernières années).
L’évaluation est assez simple pour les bois façonnés, le client étant très souvent le transformateur direct. En particulier lors des ventes par contrat, l’ONF s’astreint à approvisionner les scieurs locaux. On constate donc qu’une part conséquente du bois d’œuvre vendu façonné est transformée sur le territoire du Pays.
Pour les bois vendus sur pied, l’évaluation est beaucoup plus aléatoire, car elle se base sur le déclaratif d’un échantillonnage des clients. Une forte proportion est dans ce cas vendu aux exploitants forestiers qui trient et orientent les bois vers le client mieux-disant. L’orientation de la destination des bois échappe alors tout à fait au producteur ou à son gestionnaire. Le principal critère orientant le flux devient donc le prix, ce qui explique l’augmentation visible des volumes de bois exportés, en particulier vers la Chine, ces dernières années. En effet, des offres d’achat ont été faites aux exploitants et coopératives permettant de mieux rémunérer que le marché local, malgré les frais de manutention et de traitement des bois induits, et ce pour des exigences de qualité moindre. L’écart de prix s’est réduit à l’automne 2012 mais ce marché reste intéressant pour un certain nombre de basses qualités.
Depuis les scieries
À partir des questions posées lors des entretiens auprès des scieurs, nous avons essayé de quantifier la destination des produits issus de la 1ere transformation. Il s’agit avec ces chiffres de définir des ordres de grandeurs concernant les flux.
Figure 2 : Destination des produits transformés en hêtre
Cette analyse démontre que très peu de bois scié est valorisé localement. À part les bois de calage qui sont destinés à l’industrie française, les entreprises sont obligés de se tourner vers des marchés lointains, en Union Européenne, voire au Maghreb et vers la Chine, pour vendre des produits. La valeur ajoutée de la 1ère transformation n’est pas optimisée. Les marchés des grands distributeurs en France leur sont souvent inaccessibles en raison d’une production individuelle insuffisante pour accéder à ces marchés.
Les principaux scieurs de hêtre vosgiens se répartissent en 3 grands groupes, ayant leur propre contrat (qualité, volume, prix, cadencement, etc.) et donc leur propre cahier des charges :
- scieurs de bois «qualité plots et avivés»
- scieurs de bois «qualité emballage - calage»
- scieurs «toutes qualités»
Leurs besoins en hêtre ont été estimés en 2014 à 140 000 m3 de grume. Cet approvisionnement s’est fait sous deux formes :
- 76 000 m3 sous forme de contrat d’approvisionnement des forêts domaniales (FD) et des forêts communales (FC).
- 64 000 m3 sous forme d’achat de bois par adjudication publique ou négociations avec des exploitants de forêt privée.
Les contrats d’approvisionnement en FC et FD, avec 54 % du volume concerné, représentent donc le mode d’achat privilégié des scieurs de hêtre vosgiens. Les 76 000 m3 concernés proviennent :
- des Vosges - 39 400 m3
- du restant de la Lorraine - 23 400 m3
- d’autres régions limitrophes - 13 200 m3
D’après les entretiens réalisés dans le cadre du diagnostic, le principal frein à la gestion du Hêtre et à sa mobilisation est le marché du bois non porteur et les prix trop bas. En effet, dès lors que les exigences de prix minimum sont en décalage avec le prix du marché, les propriétaires, privés comme publiques, sont tentés de reporter les coupes pour attendre de meilleures conditions de vente. Le marché du Hêtre a été mis à mal suite à la tempête et ne s’est pas relevé depuis.
Ainsi, même si la sylviculture dynamique est intégrée par les professionnels et les élus, elle peut être difficile à mettre en place faute d’exploitations. En effet, les deux conditions nécessaires à la réussite de cette sylviculture sont la mise en œuvre des travaux et la réalisation des coupes au moment opportun. Les coupes programmées étant légères mais fréquentes (6-8 ans), tout report d’exploitation peut rapidement remettre en cause la fréquence de passage en coupe. En parallèle, la réduction des recettes de vente des bois remet en cause l’investissement dans les travaux sylvicoles, nécessaires au bon développement des peuplements dans leur jeune âge.
En forêt privée le frein premier relevé d’après les entretiens réside dans le prix de vente des bois. Un autre frein important est le morcellement de la forêt qui implique :
- Le nombre important et l’éloignement des propriétaires : une forte proportion de propriétaires de petites et moyennes propriétés est passive vis-à-vis de la gestion de leur patrimoine forestier et ont besoin d’être informés, conseillés et aidés dans la mise en œuvre des coupes et travaux. Il est évident qu’une animation conséquente est nécessaire pour contacter, informer, convaincre et relayer ces propriétaires. La mission est d’autant plus délicate que ces propriétaires ne sont pas toujours bien référencés, ne sont plus sur place et parfois sans aucune culture forestière.
- Les difficultés d’exploitation et de mise en marché : en particulier en peuplement feuillus, le prélèvement d’une coupe dans une forêt de petite surface génère en général un petit volume. L’achat de ces volumes n’intéresse plus les scieurs, et ce d’autant plus qu’ils sont mis en vente sur pied et que ce dernier doit se charger d’organiser l’exploitation. En outre, quelle que soit la taille d’un chantier et son volume moyen, les frais fixes d’organisation et de transfert de matériel sont identiques. Les entreprises ne sont naturellement pas très intéressées pour réaliser des petits chantiers.
- Une autogestion des peuplements : une partie non négligeable des exploitations réalisées en forêt privée ne rentrent pas forcément dans le circuit économique mais servent à l’auto-alimentation en bois de feu des propriétaires. Dans ces situations d’autogestion, le devenir des grumes de bois n’est pas forcément optimisé car elles ne généreraient pas de lots suffisamment grands. Par ailleurs, il n’est pas rare que la sylviculture appliquée soit en décalage par rapport aux recommandations des professionnels, soit par manque de connaissance, soit car la surface travaillée ne permet pas de mettre en œuvre les bonnes pratiques.